Mercredi 10 Mars 2021, la nouvelle est tombée comme un couperet! Un communiqué de la présidence de la république annonce le décès en Allemagne du premier ministre Hamed Bakayoko. Bien que la gravité de sa maladie ne faisait plus aucun doute, suite à son hospitalisation en France et en Allemagne, personne ne souhaitait cette fin, si prématurée, de celui que beaucoup considéraient comme le «Golden Boy» de la politique ivoirienne. Et cela pour plusieurs raisons!

En premier lieu, le défunt premier ministre avait une personnalité engageante et très appréciée des ivoiriens. Il était l’un des rares hommes du pouvoir qui avait ses entrées dans les états-majors de plusieurs partis de l’Opposition.

En second lieu, personne ne voulait envisager les conséquences politiques du décès brutal d’un tel homme. Déjà, huit mois plus tôt, une onde de choc avait traversé tout le pays avec la disparition inattendue du premier ministre Amadou Gon Coulibaly, candidat du RHDP à l’élection présidentielle du 31 Octobre 2020. Sa mort avait rebattu toutes les cartes et entrainé le revirement du président Ouattara sur sa décision de ne point briguer un troisième mandat. Ce qui avait entrainé une levée de boucliers et toutes sortes de supputations au point de pousser les principaux candidats de l’opposition à se retirer du processus électoral. Un seul opposant était resté dans la course et l’élection finira bien par avoir lieu. Le président Ouattara sera déclaré vainqueur avec 94% des voix et un taux de participation de 53,9%.

Mais depuis, le pays avait connu une décrispation qui suivait son cours normal.
Le 6 Mars 2021, des élections législatives auxquelles prirent part tous les grands partis de l’opposition, eurent lieu dans le calme et sans incidents majeurs. Le RHDP, le parti présidentiel, est donné gagnant avec 137 sièges contre 91 sièges pour l’opposition. Tout semblait donc de bon augure pour la Côte d’Ivoire et la reprise était attendue tant sur le plan politique, social et économique.

La mort soudaine du premier ministre Bakayoko replonge le pays dans l’incertitude pour un certain temps. Une nouvelle fois, et en moins d’un an, les cartes vont être encore rebattues. Et le président Ouattara est attendu sur bien des décisions qu’il devra prendre concernant les changements au sommet de l’Etat. Qui va-t-il nommer pour remplacer Hamed Bakayoko au poste de premier ministre? Et surtout qui choisira-t-il pour le poste de vice-président resté vacant depuis plusieurs mois. Une décision qui sera scrutée de près par l’opposition et de nombreux observateurs car selon la constitution ivoirienne, c’est le vice-président qui assure l’intérim en cas de vacance du pouvoir. Il est donc le dauphin constitutionnel du chef de l’Etat.

Mais certains adversaires irréductibles du pouvoir ne perdent rien pour attendre! Ils sont passés à l’attaque, avant même le retour de la dépouille mortelle à Abidjan. Les supputations vont bon train et les réseaux sociaux sont inondés de fausses informations pour tirer le maximum de capital politique de la disparition soudaine d’un homme qui était perçu comme un successeur potentiel du président Alassane Ouattara.

Les uns s’interrogent sur la cause du décès et font remarquer qu’il s’agit du deuxième cas en moins d’un an. Ils y voient donc une main noire qui serait à l’œuvre pour contrôler le pouvoir à tout prix. Or ils oublient que l’un dans l’autre, c’est le pouvoir qui sort très fragilisé de la perte de ses cadres les plus compétitifs et les plus aptes à gouverner. Voulant à tout prix semer la discorde au sein du camp présidentiel, ils oublient de se poser la question que toute personne raisonnable se poserait: «Mais au fait à qui profite le crime?».

Certainement pas à celui auquel le défunt avait juré fidélité et soutien indéfectible. Et si seulement, ils avaient lu aussi le livre écrit par Pierre Accoce et Pierre Rentchnick, «Ces malades qui nous gouvernent», ils auraient compris qu’il n’est pas rare pour un dirigeant de tomber malade ou de passer l’arme à gauche sans que cela ne soit forcement la conséquence d’un acte criminel.

Pour les autres, il s’agit d’agiter l’épouvantail d’une malédiction qui frapperait l’entourage proche du chef de l’Etat, et en premier lieu toute personne qui se hasarderait à convoiter le fauteuil présidentiel. On se lance dans un jeu macabre pour faire croire aux gens que plusieurs personnalités du régime seraient malades au point d’être condamnés à leur tour. C’est ainsi qu’une folle rumeur à circule sur la toile selon laquelle, le premier ministre intérimaire, Patrick Achi aurait été lui aussi évacué en France pour cause de maladie.

L’information fut relayée en boucle à tel point que l’intéressé fut obligé de publier un démenti sur sa page officielle. D’autres personnalités du RHDP, comme la grande dame Henriette Diabaté, furent elles aussi, citées comme souffrantes ou ayant succombé à une maladie. Jusqu’au moment où ce jeu macabre va se retourner contre leurs auteurs.

De fausses informations commencent à circuler selon lesquelles de grandes personnalités de l’Opposition comme Guillaume Soro seraient elles aussi décédées. Ce dernier fut contraint de faire une sortie pour nier l’information et indiquer qu’il est bel et bien vivant et en forme.

Finalement, tout le monde aura compris qu’il n’est pas recommandé de politiser la mort d’autrui et que dans le jeu politique aussi, il faut marquer une pause quand l’adversaire est à terre. Surtout quand on sait que la mort frappe à toutes les portes. AlloAfricaNews

 

Par T. Sadou Diallo, Président du Mouvement pour la Refondation de la République, contributeur à AlloAfricaNews